Relire Fariba Adelkhah pour comprendre la victoire des taliban

Numéro: 
54
Date: 
Août 2021
Année: 
2 021

Type de pub.:

Auteur: 
Fariba Adelkhah
Résumé: 

Les distorsions que l’intervention occidentale a fait subir à la société afghane procédaient d’un effet de ciseau. D’une part, les acteurs étrangers sont demeurés prisonniers d’une approche culturaliste du pays qu’ils ont contribué à traditionaliser, et notamment à ethniciser. D’autre part, l’aide au développement a recelé un potentiel de déstabilisation de la société « traditionnelle » en en ignorant les arcanes. Cette contradiction est grosse de conflictualité dont les logiques complexes résident dans les méandres de la localité et de la segmentarité que ne pénètrent pas les acteurs étrangers. Depuis plusieurs décennies, la mobilité des populations a été le principal moyen de leur survie, voire de leur enrichissement. Face à la rareté des terres arables et à la pression démographique, il ne peut y avoir de développement de l’Afghanistan sans mobilité internationale des Afghans. Alors que le monde, depuis quinze ans, ne voit plus l’Afghanistan qu’à travers la menace djihadiste, le pays adresse à l’Europe un autre message dont l’afflux des réfugiés révèle aujourd’hui la complexité : comment concilier la formation d’un État de droit répondant aux normes internationales, générant un minimum de croissance économique et de justice sociale, avec l’impératif de mobilité des hommes et l’interaction d’une diaspora forte de plusieurs millions de personnes ?